La Mort du Poète
Lorsqu' ayant épuisé le compte de mes jours
Et payé mon obole au nocher des Enfers
J'embarquerai, damné, vers les gouffres amers,
Épargnez à mon corps le marbre et ses Toujours,
Les Regrets, les Pensées, les bouquets pétrifiés
Dont on ceint à loisir les tombes et les stèles,
Encerclant dans un sort de celui ou de celle
Qu'on eut aimé hier la forme putréfiée.
Puisque mon âme condamnée devra purger
Pour une éternité la peine du menteur,
Du voleur, du pervers et du blasphémateur,
Confiez ma cendre à la tendresse d'un verger,
Aux bras de la rivière, à la joie d'un ruisseau,
Aux murmures d'un arbre, aux plages de la mer;
Que je m'apaise enfin, transparente poussière,
Au sourire audacieux d'un garçon brun de peau.
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