Tous les matins elle se levait en douceur, en prenant garde à ne réveiller personne, puis allait faire sa toilette et buvait son café. Tous les jours, elle allait travailler avec acharnement afin de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille. Tous les soirs, elle embrassait ses enfants avec amour et leur comptait de fantastiques histoires jusqu’à ce que leurs paupières se ferment. Toutes les nuits, elle s’endormait dans les bras de son mari. A présent, elle n’est plus.
Son visage paraissait délicatement ciselé par un orfèvre obsédé par la perfection. Un visage d’une finesse, d’une subtilité et d’une pureté que venait adoucir les étoiles de joie que l’ont voyait dans ses yeux.
Elle avait les yeux verts. Des yeux qui pétillaient d’une intelligence délicieusement teintée d’humour, parsemée de curiosité, le tout sublimé par une pointe de naïveté qui la rendait bien plus belle que tout autre femme. A présent, elle n’est plus.
Elle avait des cheveux d’un noir de jais, tombant élégamment en cascades sur ses douces épaules. Des cheveux d’une beauté et d’une splendeur tellement naturelles que l’on eu put la croire non humaine.
Elle avait une peau d’une pâleur telle que, si elle avait été une déesse, personne ne se serait permis d’en douter. Une peau d’une telle douceur qu’elle semblait sortir tout droit de nos fantasmes les plus profonds. A présent, elle n’est plus.
Elle aimait sentir les parfums des fleurs, du vent et de la nuit. Mais rien n’égalait son propre parfum, qui offrait à nos narines toute la beauté olfactive du monde.
Elle avait une voix chantante comme la pluie, rayonnante comme le soleil et triste comme la lune. Une voix douce et vibrante, qui faisait frissonner quiconque l’entendait. A présent, elle n’est plus.
Elle aimait se vêtir de robes rouges, un rouge profond, passionnel et enivrant. Des robes de soies que la moindre brise agitait délicatement, mettant ainsi en valeur ses jambes délicates et sublimes.
Sa démarche était assurée et envoûtante, danse parmi toutes les beautés de ce monde. Elle se tenait droite, fière mais non pas arrogante, belle et modeste, telle un ange venu nous donné un aperçu du paradis. A présent, elle n’est plus.
Elle appréciait la lecture, la philosophie et la musique classique. Elle adorait la cuisine thaïlandaise, les films de sciences fiction et la poésie. Elle était folle de ses enfants, de son mari et de l’amour pur et infaillible qui les unissait. Elle chantait le soleil et la lune, dansait la pluie et le vent. Elle aimait la vie, et la vie l’aimait. A présent, elle n’est plus.
Fin n°1 :
En vérité, je vous le dis, jamais un contrat ne m’avait fait entrevoir à ce point la beauté humaine. Mon métier n’est finalement que peu enviable. J’ai à présent le choix : continuer ces assassinats qui me permettent depuis tant d’années de m’offrir tout ce que j’ai pu désirer, ou bien tout plaquer et finir ma vie comme citoyen honnête, travailleur et mal rémunéré.
Je ne peux malheureusement empêcher ses yeux verts de me hanter, de continuer à m’observer par delà la mort et la souffrance, comme une lointaine malédiction. J’ai bien conscience que je n’arriverais sans doute jamais à m’en défaire, si ce n’est dans ma propre mort. J’entrevois alors une troisième possibilité. Un suicide est dangereusement attirant. Je me laisse envoûter par l’idée d’un tel acte. Simple, efficace et radical, supprimant toutes les contraintes de la détestable situation dans laquelle une vie amorale m’aura entraîné. Je ferme les yeux et me laisse guider par mes seules pensées.
Mais seuls ses yeux verts se présentent à moi. Comment diable peuvent-ils m’obséder à ce point ? Quoi que je fasse, ces deux émeraudes me fixent intensément. Des yeux remplis d’étonnement, comme si rien ne pouvait ternir cette innocence, pas même une mort imminente. Voilà un fait que je ne peux comprendre. Ce ne sera sûrement jamais à portée de mon entendement.
Petit à petit, deux de mes trois possibilités s’estompent. Je cherche à comprendre le choix irrationnel qui semble s’imposer de lui-même. Pourquoi donc seule cette solution me parait acceptable ? Là encore, je ne peux comprendre.
Ça y est, la solution m’a envahit. J’arrête de chercher le pourquoi et me concentre sur le comment.
Ma main esquisse un imperceptible mouvement vers un bout de papier sur lequel sont écris un nom et un numéro de téléphone.
Je souris.
Je saisi mon combiné et pianote joyeusement le numéro de ma prochaine victime.
Fin n°2 :
Je suis heureux que tout se termine ainsi. Je méprise totalement tout sentiment de compassion hypocrite que les humains éprouvent pour leurs semblables. Voici une excellente façon de les surprendre. Apprécieront-ils ce que je viens de faire ? Pourront-ils comprendre le sens d’un tel acte ?
Car, en effet, sa mise à mort fût longue et douloureuse. Les supplications déchirantes qu’elle lançait feront pâlir plus d’un de ces insipides humains. J’hésite quand même. Vont-ils comprendre ?
Peuvent-ils seulement saisir la portée de ce que je leur offre ? Eux, dans leur prétendue innocence, ignoreront la subtilité de mon assassinat. Ils n’y verront sûrement qu’un sujet de conversation comme les autres et feront semblant que considérer mon œuvre comme un fait choquant.
Je dois cependant essayer.
Leur mièvrerie. Leur fausse gentillesse. Leurs dons entièrement intéressés. Tout ceci m’écœure au plus haut point. Et, moi, dans ma grande bonté, je vais leur ouvrir les yeux. Je leur offre un meurtre froid et méthodique. Un meurtre de ma main. Un meurtre au cours duquel je n’ai éprouvé qu’harmonie et délivrance.
Je ne vais pas revenir en arrière. Je vais suivre la voie que je me suis écrite.
Je saisi le combiné et appelle mon éditeur.
Il ne va pas apprécier la fin de ma série.
Commentaires (2)
Ben c'est que je fais il me semble 😊
En toute honnêteté, j'ai déjà essayé des textes qui ne parlent pas de genre de sujet, j'ai un peu plus de mal.
De plus, ton commentaire n'est valable que si tu choisit la première fin ^^
Ah, j'y pense. Tous mes textes ne parlent pas de la mort, j'ai ai un qui parle de la drogue \o/
Plus sérieusement, le prochain texte que je compte écrire (là je poste les textes que j'ai écrit il y a longtemps) ne parle ni de l'un ni de l'autre. Il y a des chances pour que ce soit une danse. Ceci étant, j'ai encore un ou deux vieux textes à poster en attendant.
commentaire
Non, sérieusement, j'aime bien. Même si la prose, je préfère la lire sur papier que sur ordi, mais bon. J'aime bien.