Lettre à un ami©Ce texte est protégé par un copyright.
Mardi, le 4 février 2003
Salutations, cher collègue.
Une telle découverte se devant d’être transmise, je m’empresse de vous en faire part. Car aujourd’hui, voyez-vous, toute mon âme s’est retrouvée bouleversée. Cette découverte, c’est un être humain du sexe féminin. Du moins, c’est ainsi que je l’aurais désignée jusqu’à aujourd’hui. Je me sens à présent contraint d’utiliser le mot – plus simple et donc plus couramment usité – de femme.
Elle a les yeux bleus. D’un bleu saphir, profond et mystérieux, qui feraient longtemps rêver quiconque le verrait. Un bleu éclatant, aussi insondable que les plus profonds abysses et aussi limpide que l’eau de roche. Un bleu naturel et pourtant d’une splendeur que je ne reverrais nulle par ailleurs. Un bleu ensorcelant, dont la majesté s’est saisie de mon être.
Son nez est unique. Dessiné en une douce courbe légèrement provocante. Les narines, fines et délicates, sont à l’image de l’organe. Le tout ayant un air moqueur mais sobre, arrogant mais respectueux. Magnifique.
Sa bouche est superbe. Pulpeuse sans trop l’être, souriant et triste à la fois. Une bouche sensuelle – sans pour autant être vulgaire – et d’une ardeur rieuse et enivrante. Une bouche heureuse et grave, belle par delà la souffrance.
Son visage est sublime. Sa finesse est telle qu’il saurait inspirer bon nombre d’artistes. Ciselé dans la perfection, créé dans le calme et la beauté, il est impossible de ne pas l’apprécier. Voilà un visage qui mettrait d’accord toute personne cherchant objectivement le beau.
Ses cheveux sont noirs. Un noir d’ébène, mettant en valeur la pâle beauté de son visage. Un noir dont les nuances changent délicatement selon l’éclairage ou la température, subtil mais captivant.
Son corps est parfait. Tout de douces courbes et tel que les proportions sont absolument irréprochables. Subtilement provoquant, incroyablement déroutant.
C’est un ange.
J’essuie fébrilement mon front du revers de la main. Pour la première fois de ma vie, je sais que je suis amoureux. Nul besoin de comprendre ce phénomène, de le décortiquer méthodiquement afin d’en découvrir les secrets, il me suffit de savoir. Et cette sensation, loin d’être désagréable, m’envahit de sa magnificence. Voici sans aucun doute la plus belle – pardonnez l’utilisation d’un mot aussi trivial – expérience qui me sera arrivée au cours de ma misérable vie.
Le temps me manquant, je dois à présent vous laisser et retourner à mon travail.
On m’apporte justement le corps suivant.
Amicalement vôtre, Dr. A. Black, médecin légiste.
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