Opération Nuit^{©Ce texte est protégé par un copyright.}

3h25 – Plus que huit minutes. Dans l’obscurité ambiante, mon ouïe me sert bien plus que la vue. Je me glisse silencieusement au travers de la porte. Je m’arrête et écoute attentivement. Rien. Pas le moindre bruit indiquant la présence d’un garde. Je parcours le couloir, m’arrêtant régulièrement afin de sonder les alentours. Au bout du couloir, une porte. La dernière porte.

3h14 – Ombre parmi les ombres, je pénètre dans le bâtiment. Bizarrement, je ne rencontre que peu de gardes. Le peu que je rencontre n’a malheureusement pas le temps de me renseigner à ce sujet. Ils n’ont d’ailleurs pas le temps de dire quoi que se soit, et leurs yeux sans vie ne révèlent que leur incompréhension quant à leur mort. Je parcours ainsi nombre de couloirs redoublant de prudence à chaque porte ou intersection.

3h13 – Je l’ai enfin trouvée. Je fais sauter les fusibles. Tout le bâtiment se retrouve plongé dans le noir. Il me reste à compter de maintenant une vingtaine de minutes avant que l’équipe de maintenance ne réactive l’éclairage. C’est amplement suffisant pour mener ma mission à bien. Je réajuste mon holster de cheville. Celui qui m’a été fourni semble mal conçu, et commence sérieusement à m’énerver.

3h11 – Un garde se trouve à une dizaine de mètres devant moi. Il est armé, comme tous ses collègues, d’une bonne et solide AK-47. Je me rapproche de lui. Mon entraînement passé me permet de me mouvoir aussi silencieusement qu’un fantôme. Arrivé derrière lui, je saisi mon couteau. Dans un éclair d’acier, sa gorge s’ouvre. Il s’effondre. Je rengaine mon arme dans un chuintement feutré. A présent, trouver la boîte à fusibles.

3h08 – J’observe le complexe. Plus que deux minutes avant l’heure prévue. Un signe lumineux sur ma droite m’indique que le générateur secondaire a bien été mis hors service. Parfait. Le plan n’a aucune raison de ne pas se dérouler comme prévu. Plus qu’une minute avant le début des opérations. Quarante-cinq secondes. Trente. Dix. Cinq. Deux. Je me lève et abat un garde qui faisait paisiblement sa ronde. Le silencieux a étouffé le bruit de coup de feu.

3h06 – Je pense à la mission. Elle a été pompeusement baptisée Opération Nuit. Je n’ai jamais compris pourquoi on se donnait autant de mal à choisir le nom que l'on va donner au déroulement des opérations. Trêve de réflexion. Je ne suis pas là pour penser, mais pour agir. Je vérifie une dernière fois mon équipement et le chargeur de mon arme. Tout est en règle.

3h00 – Dernier rassemblement. L’un après l’autre, nous récapitulons notre rôle. Notre chef de mission nous lance un dernier regard emplis de confiance que l’équipe d’élite que nous formons ne peut que mériter. Sur un geste de sa main, nous nous déployons et prenons position autour du bâtiment. A présent, il ne me reste plus qu’à attendre.

3h26 – C’est à moi qu’avait été confiée la principale partie de la mission. J’en ressens d’ailleurs une certaine fierté. Mauvais. Je ne suis pas censé laisser place à mes sentiments durant une mission. Je pousse la porte, et me dirige vers le bureau, dans lequel sont sûrement rangés les documents. Un frémissement autour de moi me fait m’arrêter. Je ne suis pas seul. Je jette un regard alentour et compte une douzaine de AK-47 tournées vers moi. Impossible. Comment ont-ils pu être mis au courant ? Un bruit derrière moi. Je m’apprête à me retourner quand une seringue vient se planter dans ma nuque. Ma vue se brouille. Je m’évanouis, un mot résonnant douloureusement dans mon esprit. Trahison.


Trahison : 1. Crime de celui qui livre ou abandonne quelqu’un ou quelque chose par perfidie. 2. Fait de se montrer infidèle, déloyal vis-à-vis de quelqu’un ou quelque chose. 3. Exprimer quelque chose d’une manière peu fidèle. 1. Crime de celui qui livre ou abandonne…


Je me réveille doucement, les pensées encore dans le brouillard. Tout ce qui se trouve autour de moi est blanc. Si blanc. Mes bras semblent entravés par quelque chose que je ne peux pas encore distinguer. Des blanches silhouettes se déplacent en parlant. Il me semble qu’elles commentent mon état. Mon esprit embrumé réussit à saisir quelques bribes de conversations : … s’est évanouit brusquement et … plusieurs fois prononcé distinctement le mot trahison … devrait peut être augmenter la dose, il … reprendre des forces, c’est plutôt … ouvert les yeux… La vue me revient subitement. J’ai l’étrange impression d’être déjà venu ici. L’état de mon corps m’informe que je suis resté évanouit quelques heures. Pourquoi donc semblent-ils croire que je suis ici depuis plusieurs années ? Je ne comprends plus rien. Je baisse les yeux et contemple, épouvanté, mon corps. Quiconque ferait de même ne pourrait croire que je suis ici suite à une mission qui a mal tourné. Mes armes se sont volatilisées. Il en va de même pour tout mon équipement, ainsi que de mes sombres habits. Je ne suis vêtu que d’un simple pantalon de coton et d’une camisole de force.