Vincent Van Gogh
حُرّيّة
Tempête de lumière
et je marche en frissonnant,
la rue, la nuit, les fanions,
le bruit, les constellations
des réverbères.
Prends le ton gris du bitume
sur ton tableau, qu'il soit blond,
la couleur du blé, et Mars
et Jupiter, ondes lasses,
les cieux s'enfument.
Il pleut du tube à essai,
les vélos roulent plus vite ;
le Sud, l'amour, les cyprès,
le feu, Dieu et moi tout près
de toi, tu sais ?
Tu peux mourir de fumer
demain, ou bien d'autre chose,
tu peux crier et vomir,
pleurer, cracher et gémir,
mourir d'aimer.
Y'a toujours quelqu'un sur terre
qui t'aimera malgré tout,
c'est terrible. On ne peut pas
cesser de marcher au pas
vers la poussière.
Un jour tout le monde part
et moi le dernier, toujours ;
vers le passage à niveau,
j'espère comme un veau
aux abattoirs.
ڂa y'est ! je suis somnambule !
- Et moi je suis ingénieur.
- On baise ? - Oui, viens et mords-moi,
passent les jours et les mois
qui éjaculent.
C'est le moment du départ
encore. Je suis si triste
de vous devoir fuir si loin...
allez, je ne vous hais point
puisque je pars.
Un jour je pleurerai moins,
les choses seront moins gaies,
sans doute un chagrin nous quitte,
sans doute l'amour s'alite
et fuit, c'est bien.
J'étais quand même tout chose
en te laissant sur le quai,
et je ne sais trop pourquoi ;
Saint-Ouen meurt, passe plus bas
la Seine rose.
Voilà. C'est encore un train
(relents d'air climatisé)
l'angoisse, les gens encore,
l'été passant sur mon corps
fauché, refrain :
y'a toujours quelqu'un sur terre,
qui marche au pas, somnambule,
passent les jours et les mois
et je ne sais trop à quoi
l'amour nous sert.
C'est assez d'avoir voulu
vivre sans avoir vécu.
J'aimais le parfum des buis,
les adieux, le vent, le bruit
des cœurs élus.
Nous voguons bien d'île en île
en ne sachant jamais rien,
juste que tout reviendra
au premier jour ; qu'on ira
de ville en ville.
Tu sais un jour tout s'oublie,
c'est pour ne rien regretter,
et même quand nous crions,
et même quand nous fuyons,
nos mains nous lient.
Il faut que nos cœurs soient blêmes !
Un bateau part et les berges,
comme des rouleaux défilent
c'est le bordel une ville
la nuit, quand même !
Par la campagne, les soirs
sont bleus et les bois sont verts,
aveugles, chemin venant,
et je marche en frissonnant
par les prés noirs.
A quoi donc marcher nous sert ?
(till fine ?) un jour, une fête,
un soir, un chagrin, voici
les cloches tinter aussi,
toujours derrière
Il-y-a les maisons vieilles,
les cathédrales pompeuses,
il-y-a les grues liées
et leurs nuées d'escaliers
dans des bouteilles
que je mets dans une benne.
Mais l'automne arrive enfin,
c'est la fin des vraies horreurs,
enfin, la fin des malheurs,
des joies obscènes.
Nous restons gésir un peu,
on est quand même pas mort,
on attend. A tout moment,
certains s'étreignent vraiment...
tant qu'on peut.
Nous n'aimerons plus aller
rôder par les cités vides,
croupir en amont des gouffres,
sentir dans nos yeux le souffre
des bris salés.
J'aimais le parfum des buis,
passent les jours et les mois,
c'est bien pour que l'on regrette,
c'est tout. Un jour, une fête,
du vent, du bruit.
Parfois la mer lacérée
tombe un phare dans l'écume.
Déjà, vivre est suranné,
on est toujours condamné
à espérer.
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