Abandon

Sèche.
Sèche comme l’écorce d’un arbre dont la sève a déserté le corps.
Un tronc presque inutile et qui sonne le creux quand je ne peux plus lire d’amour dans d’autres paires d’yeux.
Les yeux d’un autre humain qui ne soit pas des miens, qui me soit étranger et puis tellement frangin dans son humanité et dans sa façon d’être, pour voir les choses ensemble et non comme une esthète.
Retrouver le chemin de l’abandon total, l’amour à l’unisson de deux corps en campagne, qui s’offre l’un à l’autre tout le plaisir suprême dont, effectivement, même dans ses doux rêves, on ne croyait possible jamais autant de fièvre.
Sentir des mains aimées caresser mes cheveux, frôler avec douceur ma bouche avec ses lèvres, y faire rentrer aussi sa langue avec passion pour que déjà nos corps se sentent en connexion.
Oter les vêtements qui nous cache des autres, pour que lui seul enfin sache ce qu’il y a derrière, parcourt de sa main, comme une terre vierge, les monts et les recoins où dorment les ruisseaux.
Chercher dedans la mousse, le goût de la bruyère, s’immerger en puissance dans l’univers des sens où tous les interdits s’effondrent pour lui plaire.
S’abandonner enfin jusqu’à l’ultime effort où s’opère l’alternance des forces en présence : le sexe faible devient fort, pendant que l’autre fait le mort.