Aimez-vous Brahms ?^{©Ce texte est protégé par un copyright.}

Attente suspendant les chuchotements du public, nos regards sont magnétisés par l'orchestre qui guette lui aussi la venue de l'artiste.

Robe verte, fluide,
Aux reflets lagon changeant,
Apparaît l'artiste

Elle est menue, fragile et ses épaules, nues et blanches, accrochent la lumière. Un visage de madone, avec des cheveux noirs, disciplinés en un chignon simplement égayé par une pince de diamants, qui lancent des feux arc-en-ciel sous les sunlights. Elle tient dans sa petite main son précieux compagnon, son violon, qui semble un prolongement d'elle,

Les bravos crépitent
déchirant enfin le silence
Quand La soliste salue.

La baguette du chef-d'orchestre dessine une arabesque et tous les regards des musiciens convergent vers cette tige blanche, qui s'immobilise un instant avant de poursuivre sa course, entraînant avec elle les premières mesures du concerto pour violon de Brahms, en ré majeur, op 77, comme nous le promettait le programme.

Haut-bois, flûte à bec,
Tuba et cor d'harmonie
Occupent l'espace.

Puis ce sont les contrebasses, et les violoncelles aux sons si profonds qu'ils vous pénètrent dans le corps et le font vibrer. L'émotion est là, présente, et le décor s'oublie soudain, car le rêve nous prend et nous fait expérimenter des territoires vierges de nos sens.

La violoniste
Perd son immobilité,
Son corps est en transe
.
Mais d'où va t'elle donc chercher ces harmoniques si pures qu'elles nous semblent irréelles. ?
Son archet caresse les cordes de son instrument en douceur, puis soudain des sons plus graves s'en échappent, comme si la voix du violon répondait à ses plaintes amoureuses, par des notes sensuelles et enveloppantes.

Les yeux fermés
Un doux sourire angélique
Fanny s'extasie

Et moi je la découvre pour la première fois, cette presque adolescente, qui pourtant ai-je lu , ,a près de trente ans, mais à oublié de vieillir tant la musique l'habille de beauté et de jeunesse. Fanny Clamagirand est une virtuose comme l'on n'en rencontre peu.. habitée par la magie de la musique, elle a le don de nous faire planer à mille lieux au-dessus de la salle, de la ville, de la terre...

Temps suspend ton vol
Hier écrivait le poète
C'était vraiment ça.

Il y a des soirées que l'on voudrait ne jamais voir finir, mais qui vous laissent, ensuite, une joie tenace qui vous empêche de vous endormir tout de suite.
Lorsque nous sommes rentrés dans la chaleur et l'intimité de notre logis, une tarte aux pommes et une bouteille de Champomy nous attendaient et nous avons fait la fête, en évoquant Roland et moi, nos impressions et notre émotion sur ce concert, enfoncés tous deux dans le moelleux des fauteuils de velours rouges, et nos deux mains nouées pour imprimer souvent notre ressenti et notre joie, aux mêmes passages.

C'est dans ces moments-là que l'on comprend combien est belle la vie.