Flibuste
Il s'écoute vieillir. Le fauteuil flottant est son ultime pillage. Ce qui restait de sauvage en lui,
il l'a laissé mourir dans son chat.
Son chagrin désormais ronronne en un félin lémure. Il passe son temps à se friser les rides, à se lisser la grande époque; il navigue à la légère,
tout à fait célibataire.
Ainsi tangue l'usure du vieux pirate, caprice fatigué des étoiles. Il se retourne dans le carbone que le cosmos a choisi à sa place. Une mousse jaunâtre humilie sa jambe de bois,
et celle-ci souffre autant que le membre fantôme tout becqueté de mouettes et de chatouilles en deuil.
Lentement coule sa plus belle île.
La pesanteur n'ironise même pas, elle triomphe grossièrement. Adieu marmonne le vieux. Mec de peu de foi,
il ne se verra plus que de dos.
Il s'éloigne sous le ciel, sous le beau bleu cyanose;
il diminue, diminue. Déjà, à force de hausser les épaules,
il n'a plus toute sa tête.
Oui le voilà tout en épaules, tout en perchoir.
Un perroquet lui tient lieu d'âme, la bronchite de tempête.
Oui le temps tousse,
le temps tousse à l'intérieur.
Il diminue,
il diminue vers le soleil couchant -crâne peu crédible. À force de hausser l'horizon,
le Monde boit la perspective et digère les éloignés.
Maintenant tout n'est plus qu'océan, océan et sirènes pas fraîches. que noyés ébahis. On ne sait pas si l'on nage ou si l'on prie,
mais, sûr, c'est fatigant, Et le présent picole les fatigués,
épuise son espace de grimacer immensément la transparence.
Commentaires (7)
il boit ce rhum , boisson roborative et sexuelle
Texte qui me fait penser à ces flibustiers de jadis qui ont piraté les trésors de mon île, ma terre natale. Triste page de l'histoire heureusement tournée. Et si nous pourrions être des flibustes modernes partant à la recherche des mauvais sentiments qui empoisonnent tant les relations humaines afin de les soumettre aux flammes de l'amour. Cet Amour dont l'un des délicieux fruits est bien la tolérance. On parle souvent du fruit en oubliant l'arbre lui-même. Quand on ne respire que la haine, il est impossible d'expérimenter la tolérance dans son vrai sens. Ensemble dans le bateau pour cette chasse du siècle. C'est qui le capitaine ?
Bonne continuation ami-poète !
Qu'il est bon de lire du bon sur ce site, parfois, quand viennent les grandes lunes, pas souvent, mais avec splendeur.
P.A.M
Votre écriture n'est pas toujours facile à ...appréhender, c'est le moins qu'on puisse dire. Je me demande parfois où vous voulez en venir, nous emmener. Et puis, avec bonheur, je renonce à savoir, chercher, comprendre, pour faire mon propre chemin. Sacrée cadeau que cette liberté que vous nous offrez !
Et puis, je vous l'ai déjà dit je crois, vous réussissez à faire naître l'impossible, à donner vie et forme à ces images à la limite de l'absurde. Il est aisé, je crois, de susciter chez l'autre une image du réel, du possible. Mais vous, je ne sais pas comment, en deux mots, vous donnez vie et réalité à l'impossible. Vos "sirènes pas fraîches" existent, je vous assure.
Drôle de sensation que cette écriture qui s'inscrit en images dans ma cervelle...
Il y a définitivement quelque chose que j'aime dans votre écriture.
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