Les panthères sont parties
Bangui ma terre, où sont les clefs ?
La maison est fermée, la porte close, papa est sorti
Au P.K. 0, centre-ville, le goudron est républicain
Le monument politique, must stalinien
Proclamant que « le travail est l’unique voie de développement » !
Ici, papa a tellement travaillé, prié, donné, aimé
La vie
La nuit, sur la colline, jouaient les panthères dans le jardin
La mangouste guettait le serpent
La tsé-tsé se tapissait pour voler le temps
Le moustique se faufilait comme à présent
Dessinant l’Oubangui, le fleuve berce les pirogues
Qui glissent sans bruit au chant du Sango
Au pied de Ngaragba, les terriens étalent leurs parcelles
Autour du vieux chef qui se rappelle d’un temps
Où les Noirs vivaient avec les Blancs. Vraiment ?
C’était ici – Avant – Il y a longtemps
L’Egalité n’était pas toujours fraternelle
Mais Dieu, la terre, le travail, le vécu pouvaient rendre proches ou solidaires
Ceux qui voulaient vivre l’aventure et le prix
De cultures respectées, de libertés imparfaites mais partagées
Aujourd’hui Bangui a déserté sa cité tel un jour sans marché
Les rues sont vastes, clairsemées, ponctuées
De banguissois dévisageant le passant, surtout le Blanc
Le garage a fermé, l’auto est japonaise, l’hôpital en chantier
Aéroport, villas, palais sont bien gardés, interdits d’être filmés
L’eau est minutée, l’électricité délestée, la pauvreté trop accoutumée
Le goudron disparaît vite aux ruelles, là où règne la piste
Dimanche à la Messe, le tam-tam rythmera la joie, le chœur
Et la danse des chrétiens en digne habit festif pour leur Seigneur
Notre-Dame demeure en majesté
De son époque - avec ses us et costumes - papa n’avait cependant pas d’idéal dit colonial
Son ascenseur social, baptisé Renault-Billancourt, permis à l’ouvrier tout court
De se dépasser, sans renier jamais dans sa condition d’être né
L’Afrique fût sa chance, terre d’espérance, cadeau
Horizon ouvert, chemin nouveau, beauté germinale, initiale
Berceau créatif, créateur, généreux de sueur comme de coeur
Que reste-t-il de mon père, des dons offerts, des prières sincères, du dur labeur ?
Où sont les ouvriers de toutes les heures ?
Reconnaître les pas d’histoires, savoir d’où l’on vient, voir les traces des anciens
Ecrites de pistes, construites en pierres, dites de paroles, de silences ou de riens
Où sont passées les panthères ?
Bangui ma Mère, où je suis né
Sans te connaître, je t’ai aimé
Blanc de peau et fils en douce terre d’africanité
En français natal, primordial
Etonné, je veux babiller, chuchoter, converser
Renaître ici à ma part personnelle d’humanité
Co-naître
Devenir fraternel en co-humanité approchée, échangée, révélée
Revêtir l’hospitalité capitale
Comme une robe baptismale totale
Les panthères sont parties, reviendront-elles un jour ?
Dieu sait ma prière, il a les clefs de toujours
Bangui garde la maison de mon père
Je reviendrai voir les panthères
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