La Princesse Carotte
Il était une fois un potager extraordinaire….
En son milieu trônait une Citrouille gigantesque,pas tout à fait comme les autres. Elle était percée de nombreuses fenêtres et d’une large porte d’où s’échappait une musique mélodieuse. Mais que voit on dans une citrouille lorsqu’elle ouvre largement porte et fenêtres ? Qu’y voit-on ?
On y voit, on y voit…
Un Poireau en habit de satin vert portant une couronne d’or, danser avec une jolie Tomate, corsetée dans une robe de soie rouge et coiffée d’un haut hennin qui parlent ensemble :
« Mon cher mari, que je suis heureuse que notre petite princesse Carotte soit née si belle et en bonne santé. Comme j’aime sa longue chevelure verte!Et ses yeux ? Avez-vous vu le ciel s’y reflète ? »
« Ma reine, ma reine, je suis tellement content, notre fête est si joyeuse, il est temps de demander à nos amis, les fées et le magicien du soleil de faire leurs cadeaux à notre fille chérie.
Approchez, approchez, mes amis, Fée de la pluie, Fée de la terre, Magicien du soleil ! »
Dans sa robe de perles d’eau, d’un battement de ses ailes diaphanes, la Fée de la pluie est auprès du berceau, elle se penche et dit de sa voix de cascade :
« Je te donne l’eau douce qui te fera grandir »
Puis s’avance la Fée de la terre qui murmure de sa voix profonde :
« Je t’offre ma force »
Vient enfin le tour du Magicien du soleil qui de sa barbe de lumière laisse tomber ces mots :
« Je te donne ma chaleur et mon éclat. »
Quand tout à coup le ciel se charge de nuages noir d’encre, déchirés d’éclairs aveuglants et dans un fracas de tonnerre, la très vielle fée Aubergine fait irruption !
Le roi et la reine tremblent, ils l’ont oubliée ! Ils savent que sa vengeance sera terrible.
La reine enlève son beau collier de perles et supplie : « vénérable fée Aubergine acceptez ce collier, pardonnez-nous »
Aubergine repousse la reine Tomate, se précipite vers le petit lit et lance sa malédiction :
« Tes beaux cheveux verts tu perdras et tu mourras ! »
Et dans un grand mouvement de sa robe sombre, dans un grondement terrible, elle disparaît.
La reine sanglote, les invités sont pétrifiés d’effroi, le roi désemparé ne sait que faire.
Alors la Fée de la pluie, celle de la terre et le Magicien du soleil d’une seule voix disent :
« Roi, reine, nous ne pouvons défaire ce qu’a fait Aubergine, la princesse Carotte perdra ses beaux cheveux verts mais elle ne mourra pas, elle dormira durant trois longs mois, ce sera l’hiver et le premier jour du printemps un fils de roi viendra l’éveiller d’un baiser. »
Aussitôt le roi reprend espoir et fait partout afficher l’interdiction de toucher la chevelure de la princesse. Même Petit Radis, le coiffeur de la cour n’a pas le droit de la coiffer. Seuls la reine et le roi lui font les shampoings les plus doux et la brossent longuement.
Sa chevelure embellit chaque jour et ses parents sont rassurés.
Passe le temps…
La princesse Carotte est devenue une belle jeune fille. Par un après midi d’été elle décide de rendre visite à sa cousine ,une ravissante Asperge rousse au teint de lait qui habite un potager voisin,un peu ombragé,ce sera bien agréable par cette grande chaleur.
Quand elle voit sa cousine, elle est stupéfaite, ses longs cheveux roux sont devenus bleus !
« Oh ! Tes cheveux que c’est beau, que c’est beau !comment as-tu fait ? »
« C’est la grande mode dans les potagers, tu ne sais donc pas ? Il suffit que tu utilises le shampoing Nuit bleue. »
Sur le chemin du retour la princesse imagine déjà ses cheveux bleus. Arrivée dans le palais Citrouille, elle se précipite dans la salle de bains de sa maman. Elle cherche partout, en vain, aucun shampoing Nuit bleue. Elle est si déçue.
Non vraiment elle ne peut pas attendre le lendemain pour l’acheter. Elle court dans sa chambre, ouvre les tiroirs de la commode dans lesquels elle range ses crayons, ses peintures et prend un grand tube d’un beau bleu foncé.
A l’aide d’un large pinceau, elle teint sa chevelure.
Lorsqu’elle se regarde dans le miroir elle saute de joie : ils sont bleus, ils sont bleus! Mais, soudain, elle voit avec effroi ses cheveux tomber par poignées, elle pousse de grands cris : « papa, maman !mes cheveux ! » Et glisse doucement sur le sol.
Ses parents accourent et lorsqu’ils la trouvent ainsi comprennent que la malédiction d’Aubergine s’est réalisée. Ils la transportent dans sa chambre et appellent la Fée de la pluie.
Elle arrive tout essoufflée, elle pleut à grosses gouttes tant elle s’est dépêchée.
« Roi, reine et tous les habitants du château vous dormirez ainsi que la princesse Carotte et vous vous réveillerez avec elle. Alors les uns après les autres tombent dans un profond sommeil le roi, la reine, les gardes Haricots verts, les Choux Fleurs cuisiniers, les servantes Courgettes, Petit Radis, le coiffeur et tous les autres.
Aussitôt le potager est envahi par les ronces et les mauvaises herbes. Le palais Citrouille devient inaccessible. La terre gèle, les mois s’écoulent.
Le premier jour du printemps le fils du roi et de la reine des fleurs qui est le plus charmant des princes charmants avec son élégante tige souple et sa bonne mine de coquelicot vient à passer sur le chemin qui mène au potager.
Il s’interroge : quel est donc cet endroit broussailleux ?
Une jacinthe sauvage agite ses clochettes :
« Prince Coquelicot dans ce potager dort depuis tout un hiver la plus belle princesse du monde, pour sortir de son long sommeil elle attend le baiser d’un prince, cours, cours la délivrer. »
« Comment ferai-je pour défaire toutes ces ronces ?je n’ai que ma guitare pour jouer avec mes amis. »
« Tu joueras de ta guitare prince Coquelicot et les broussailles s’écarteront mais tu devras vaincre le terrible dragon Artichaut qui garde le palais pour la fée Aubergine. »
« Comment ferai-je Jacinthe comment ferai-je ?je ne sais pas combattre les dragons. »
« Lorsque les broussailles se dénoueront tu entendras rugir Artichaut là et là seulement tu appelleras la Fée de la pluie qui t’aidera. »
Le prince suit les conseils de Jacinthe, il joue un petit air très gai qu’il aime bien
et les ronces se délient. Le palais Citrouille apparaît :
« Ouah !s’exclame Coquelicot ». Mais, dans le même instant, il entend un rugissement terrible comme celui de dix lions.
« Il appelle Fée de la pluie, Fée de la pluie ! »
Aussitôt la voici devant lui.
Dans une main elle tient un arc en ciel, dans l’autre une flèche d’eau :
« Ecoute bien, Coquelicot, tu attendras que le dragon soit près de toi et lorsqu’il ouvrira sa large gueule, tu prendras l’arc et la flèche, tu viseras sa gorge et de toutes tes forces tu tireras.. »
Et elle s’envole dans une brume d’eau…
Terrorisé le prince se répète il faut que je réussisse, il faut que je réussisse pour sauver la princesse carotte.
Brusquement artichaut surgit sur le toit du palais, toutes ses écailles hérissées,dans un nuage de fumée et de flammes ,il s’élance et dans un bruit assourdissant s’abat sur le sol, la flèche d’eau plantée dans sa gorge a éteint le feu et artichaut ne bouge plus.
Le prince court dans le palais, ouvre les portes les unes après les autres, enfin il la voit, allongée sur son lit, le roi et la reine endormis dans des fauteuils auprès d’elle. Il s’approche, elle est si belle, durant son long sommeil ses cheveux verts ont repoussé. Doucement, il dépose un baiser sur sa joue, elle bat des cils, avec elle, tout le potager s’éveille.
Si un jour vous passez près de ce potager, peut être verrez –vous jouant ensemble des petites Carottes et des petits Coquelicots, car la princesse et le prince furent si émerveillés l’un par l’autre qu’ils se marièrent et eurent…beaucoup d’enfants.
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